La préservation de la qualité de l’eau est avant tout une question de protection de la santé de la population, tant en ce qui concerne l’alimentation en eau potable que les activités de contact avec l’eau. Sans avoir la prétention de faire un tour complet de la question, la présente section explore les problématiques liées à la qualité de l’eau qui ont eu ou qui continuent avoir un impact sur la population au niveau de la santé publique.
La contamination au trichloroéthylène (TCE) de la nappe phréatique est décrite à la section eaux souterraines. Si la contamination et son impact sont plus importants à l’extérieur du territoire de l’OBV, le panache souterrain affecte toutefois une partie des eaux souterraines dans le secteur de la rivière Nelson. À cet égard, deux puits d’alimentation en eau potable à Val Bélair ont été fermés en 2009 suite à la découverte de traces de TCE (Radio-Canada, 2009). Bien que la contamination soit en deçà de la limite de 5 µg/L, la fermeture de ces puits a été faite par principe de précaution afin de rassurer la population de la Ville de Québec sur la qualité de l’eau potable du réseau (Radio-Canada, 2009). La Direction de la santé publique ne s’est pour sa part jamais opposée à la consommation de cette eau.
C’est en 2000 que la Direction régionale de santé publique a été avisée que l’eau potable des puits privés de plusieurs résidences de Shannon contenait des concentrations de TCE qui pouvaient dépasser les normes. Suite à cela, des recommandations ont été faites à la population pour réduire l’exposition au TCE, par exemple ne pas consommer l’eau et ne pas l’utiliser pour la douche et le bain (CIUSSS de la Capitale-Nationale, 2017).
Le TCE peut entrer dans l’organisme humain à la suite d’une exposition par ingestion, par inhalation ou par contact cutané. L’exposition au TCE peut entraîner des effets aigus ou chroniques, selon la durée et l’intensité de l’exposition. Une brève exposition au TCE à des concentrations très élevées peut entraîner des irritations de la peau, des yeux et des voies respiratoires, ou encore causer des nausées, des vertiges, des maux de tête et de la confusion (CIUSSS de la Capitale-Nationale, 2017).
Au moment de la découverte de la contamination, le TCE était considéré comme cancérigène probable (CIUSSS de la Capitale-Nationale, 2017). En octobre 2012, des experts du Centre international de recherche sur le cancer ont par ailleurs réévalué la cancérogénicité de plusieurs solvants chlorés et certains de leurs métabolites. Parmi ceux-ci, le TCE est passé d’une classe 2A (probablement cancérigène chez l’humain) à une classe 1 (évidence suffisante) (Guha et al., 2012). Ainsi, une exposition quotidienne pendant de nombreuses années à de faibles concentrations de TCE peut causer certains types de cancers (CIUSSS de la Capitale-Nationale, 2017).
La contamination au TCE des eaux souterraines a été un dossier fortement médiatisé. Suite à la découverte de la contamination, des montants importants ont dû être investis afin de fournir aux citoyens de Shannon une eau potable de qualité (Fournier, 2010). Un regroupement de citoyens de la municipalité de Shannon a également fait un recours collectif contre le ministère de la Défense et les anciennes Industries Valcartier. En 2012, le jugement a déterminé que les preuves épidémiologiques ne démontraient pas une proportion plus élevée de cancers à Shannon que la situation de la population canadienne en général et que la contamination pouvait être apparentée à des « troubles de voisinages » (Asselin, 2012). Le ministère de la Défense a toutefois été reconnu coupable de la pollution des eaux souterraines (Asselin, 2012).
En 2016, la Direction de santé publique de la Capitale-Nationale a publié les résultats d’une enquête épidémiologique visant à étudier l’incidence des cas de cancer du cerveau, du rein, du foie et de lymphome non hodgkinien chez les personnes ayant habité la municipalité de Shannon entre 1987 et 2001. Selon cette étude, les cas de cancers en général, et notamment du cerveau, ne sont pas plus nombreux à Shannon qu’ailleurs au Québec. Les cancers du foie et des voies biliaires y sont toutefois plus fréquents, mais l’étude ne permet pas d’établir de lien avec la contamination au TCE. (Direction de santé publique de la Capitale-Nationale, 2016). Un oncologue a toutefois remis en doute les résultats de cette étude sur la base de cohorte considérée, puisque selon lui, elle aurait dû inclure les personnes ayant habitées dans la zone exposée à la contamination, et non toutes les personnes ayant habitées Shannon dans une période donnée (Radio-Canada, 2016). Un docteur en épidémiologie arrive également aux mêmes conclusions (Radio-Canada, 2017).
Au début 2017, la Cour d’appel a accepté qu’une nouvelle preuve soit entendue et a autorisé le Regroupement des citoyens de Shannon à déposer deux rapports qui permettraient d’établir un lien entre la présence de TCE dans la nappe phréatique et les nombreux cas de cancer à Shannon. Toutefois, le gouvernement fédéral pourra lui aussi faire entendre une contre-expertise. Ces témoignages seront débattus en Cour supérieure puis ensuite renvoyé à la Cour d’appel (Radio-Canada, 2017b; Frenette, K. 2017; Cattapan, F. 2017).
La fluoration de l’eau est un procédé qui permet l’addition d’ions fluorure (fluor) dans le but de réduire le risque de carie dentaire (Gouvernement du Québec, 2012). Ce type d’intervention est controversé dans la communauté scientifique, certains y voyant des avantages, d’autres des risques à la santé. De nombreux gouvernements et organismes de santé appuient la fluoration de l’eau potable afin de prévenir la carie dentaire. D’autres groupes sont inquiets des conséquences de l’ingestion du fluor sur la santé humaine. Selon le site du Portail de santé et mieux-être du Gouvernement du Québec, l’eau fluorée permet une réduction de 20 % à 40 % de la carie dans la population, et ainsi une réduction de frais liés aux soins dentaires (Gouvernement du Québec, 2012). Toutefois, il est reconnu que les enfants de moins de six ans qui ingèrent de grandes quantités de fluorures pendant la formation des dents peuvent développer une fluorose. Des taches blanches ou brunâtres apparaissent alors sur les dents. Il est aussi vrai qu’une exposition prolongée à des niveaux élevés de fluorures peut causer la fluorose osseuse, une maladie douloureuse qui affecte la densité et la fragilité des os (Organisation mondiale de la santé, 2017). Selon Santé Canada, la concentration maximale acceptable de fluorure dans l’eau potable est de 1,5 mg/L (Santé Canada, 1998). Ainsi, les quantités présentes dans l’eau potable ne devraient pas provoquer de problèmes significatifs de fluorose dentaire chez les enfants (Gestion des ressources hydriques Manitoba, 2011).
L’histoire de la fluoration de l’eau potable à Québec débute en 1972 où l’on ajoute du fluor à l’eau potable du réseau d’aqueduc de l’ancienne Ville de Québec. À cette époque, un projet de loi provinciale poussant la fluoration de l’eau pour toutes municipalités ayant une usine de filtration est en cours d’élaboration. Ce projet de loi a été retiré peu après, mais une modification de la Loi sur la protection de la santé publique obligera les municipalités à se plier à la fluoration de l’eau potable avant le 1er janvier 1977. La mise en vigueur de la Loi fut peu après annulée. À ce moment, la fluoration de l’eau de la Ville de Québec est déjà en cours, et n’a seulement cessé qu’en 1982 en raison de problèmes mécaniques à l’usine de traitement des eaux. L’ajout de fluor a repris en 1986 (Labonté, 2009).
En 2003 une association de citoyens s’interroge face à l’ajout du fluor dans le réseau d’eau potable. La formation de la nouvelle Ville de Québec a amené une interconnexion des réseaux d’aqueducs et les eaux fluorées de l’ancienne Ville de Québec entraient donc en contact avec des eaux non fluorées des municipalités maintenant fusionnées. Le moment opportun pour rouvrir le débat vient en 2004, lorsqu’il faut décider si la fluoration de l’eau potable est étendue à l’entièreté du réseau d’aqueduc de la nouvelle Ville de Québec (Labonté, 2009).
En 2004, un comité est formé à la Ville de Québec pour étudier la question. Les recommandations de ce comité sont de cesser la fluoration de l’eau et de promouvoir un règlement provincial en ce sens. Toutefois, les recommandations ne sont pas tout de suite publiées et sombrent dans l’oubli (Labonté, 2009).
Après de nombreux débats médiatiques entre les groupes «anti-fluor» et « pro-fluor », une résolution au conseil municipal de la Ville de Québec a été adoptée en 2007 pour demander au gouvernement provincial de décider si la fluoration de l’eau potable est une obligation municipale avant le 1er avril 2008, sans quoi la Ville de Québec abandonnera cette pratique (Labonté, 2009). En mars 2008, le conseil municipal de la Ville de Québec a voté majoritairement contre la fluoration de l’eau potable. Depuis avril 2008, la fluoration de l’eau potable de la Ville de Québec a donc cessé.
En 2013, l’Assemblée nationale du Québec a mis sur pied la Commission de la santé et des services sociaux sur la fluoration de l’eau potable. Dans son rapport déposé en avril 2013, la Commission recommande que la fluoration de l’eau potable ne soit ni une mesure obligatoire, ni interdite. La Commission a par ailleurs demandé à l’Institut de la santé publique du Québec de mettre en place une veille scientifique pour recueillir toute nouvelle information pertinente sur la question de la fluoration (Radio-Canada, 2013).
Dans cette section, les phénomènes pouvant toucher la santé publique au niveau des activités de contact primaire et secondaire seront abordés. Certains des phénomènes sont localisés à des endroits spécifiques du territoire tels que les cyanobactéries et la dermatite du baigneur. La contamination bactériologique a toutefois un impact plus important sur le territoire de l’OBV de la Capitale.
Les cyanobactéries sont souvent plus connues sous le nom d’algues bleu-vert. Bien qu’elles possèdent des caractéristiques propres aux algues, comme la capacité d’effectuer la photosynthèse, elles sont classées dans le même groupe que les bactéries en raison de leur structure primitive (absence de noyau dans la cellule) (Blais, 2006).
Dans des conditions favorables, par exemple en présence d’une grande quantité de phosphore dans l’eau, les cyanobactéries peuvent se reproduire rapidement et en abondance. Elles forment alors une «fleur d’eau», qui n’est toutefois pas toujours visible à la surface, car elle peut se former plus profondément dans la colonne d’eau (Blais, 2006).
Les cyanobactéries peuvent produire des toxines appelées cyanotoxines et si ces dernières sont trop abondantes, elles peuvent nuire à la santé des usagers. Parmi les cyanotoxines, les endotoxines peuvent causer des irritations ou des effets allergiques, les hépatotoxines affectent surtout le foie et les neurotoxines, le fonctionnement du système nerveux (Blais, 2006).
les principales voies d’exposition aux toxines sont le contact cutané et l’ingestion. De façon générale, il faut éviter de consommer de l’eau non traitée (que le plan d’eau soit infesté ou non) et les viscères de poissons provenant d’un plan d’eau infesté. De même, les activités aquatiques de contact primaire (baignade, plongée, ski nautique, etc.) sont à éviter lorsque des fleurs d’eau sont apparentes (MSSS, 2012; Blais, 2006). Les lacs répertoriées pour avoir connu des épisodes de fleurs d’eau sur le territoire de l’OBV de la Capitale sont le lac Saint-Charles et le lac Saint-Augustin.
La dermatite du baigneur est une affection cutanée causée par les cercaires (petites larves de la douve) qu’on retrouve dans certains lacs. Lors de la baignade, les cercaires se collent à la peau et lorsqu’elle s’assèche sous l’action du soleil, les larves la piquent et y pénètrent. Elles y mourront ensuite. La présence de cercaires dans l’eau est due aux excréments des oiseaux aquatiques porteurs du parasite. Ce sont les escargots en bordure du rivage, hôtes intermédiaires, qui seront d’abord contaminés puis, à partir des escargots, des cercaires seront à nouveau libérées et retourneront contaminer les oiseaux aquatiques et, malheureusement, les baigneurs (MSSS, 2012).
La dermatite du baigneur provoque des effets désagréables, mais ne représente pas un danger important pour la santé. Les symptômes sont des plaques rouges sur la peau, qui gonflent au bout de quelques heures et provoquent des démangeaisons. Les plaques se résorbent au bout d’une à deux semaines. Dans certains cas, une infection mineure de la peau peut se produire. Il faut enfin savoir qu’il n’y a aucun lien entre la dermatite du baigneur et le degré de pollution de l’eau (MSSS, 2004).
Sur le territoire de l’OBV, plusieurs cas ont été observés au lac Beauport depuis 1999 (Giovenazzo, 2005). Depuis plusieurs années, la municipalité de Lac-Beauport procède à la collecte manuelle d’escargots afin de limiter la propagation du parasite. Pendant les premières années d’intervention, le taux de parasitisme des escargots était validé auprès d’un expert qui n’est désormais plus disponible pour ces analyses. Dans les dernières années, moins de cas de dermatite du baigneur sont rapportés à la Municipalité en raison de ces interventions et du fait que les usagers habituels du lac ne rapporteront pas nécessairement leurs affections (Hubert, 2012).
Les normes de concentration en coliformes fécaux pour la baignade et les activités de contact secondaires sont mentionnées à la section qualité de l’eau des rivières (théorique). Des normes sont mises en place pour assurer la santé publique en limitant la transmission de maladies infectieuses par un contact avec des microbes présents dans l’eau (MSSS, 2007; MDDEP, 2012). Les pertes d’usages dues à la contamination aux coliformes fécaux sont présentées dans la section du diagnostic Présence de coliformes fécaux.
SOURCES
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Mis à jour le 13 février 2018