L’eutrophisation est le processus d’enrichissement graduel d’un lac en matières nutritives le faisant passer de son état oligotrophe à eutrophe (Gouvernement du Québec, 2002). En d’autres termes, c’est le vieillissement d’un lac et ce phénomène se produit habituellement sur une échelle de temps très longue lorsqu’il est placé dans des conditions naturelles. Or, il peut être accéléré par l’activité humaine qui draine des nutriments vers les milieux aquatiques. Cet enrichissement provoque une augmentation de la production biologique, notamment des algues microscopiques en suspension dans la colonne d’eau (le phytoplancton) et des plantes aquatiques. Les caractéristiques du lac sont alors transformées; on trouve notamment une plus grande accumulation des sédiments et de la matière organique en raison de la décomposition des végétaux. Cette dernière accroît la consommation en oxygène dissous dans l’eau. Les modifications de l’environnement du lac associées à son eutrophisation peuvent aussi entraîner le remplacement d’organismes par des espèces mieux adaptées aux nouvelles conditions.
Les paramètres généralement utilisés pour évaluer le vieillissement des lacs sont les suivants (Gouvernement du Québec, 2002) :
L’évaluation de l’état trophique d’un lac peut se faire de deux façons. La première méthode consiste à comparer les résultats du suivi effectué avec des valeurs de référence servant à interpréter les données. La deuxième approche consiste à suivre l’évolution des mesures dans le temps pour détecter des signes de vieillissement du lac.
Le degré de productivité biologique d’un lac détermine le niveau trophique de celui-ci. Le niveau trophique est établi en utilisant des valeurs de référence pour la concentration en phosphore, en chlorophylle α et pour la transparence de l’eau. Des classes intermédiaires sont utilisées pour exprimer la gradation de l’enrichissement par les éléments nutritifs. Le graphique ci-contre illustre bien la progression graduelle du phénomène d’eutrophisation et qu’il n’existe pas de classe absolue de niveau trophique.
Bassin versant | Localisation spécifique | Description du problème | Statut |
---|---|---|---|
Saint-Charles | Lac Saint-Charles | Méso-eutrophe | Existant / À documenter |
Lac Delage | Mésotrophe | Existant | |
Lac Durand | Mésotrophe | Existant | |
Lac Morin | Mésotrophe | Existant / À documenter | |
Lacs Laberge | Mésotrophe | Existant / Vulnérable / À documenter | |
Lac Jaune | Mésotrophe | Existant / À documenter | |
Saint-Augustin | Lac Saint-Augustin | Eutrophe avancé | Existant |
Ensemble du territoire | Plusieurs lacs et cours d’eau | Il y a de nombreux lacs et cours d’eau sur le territoire pour lesquels il n’y a pas d’information disponible, ou pour lesquels l’information est désuète ou incomplète. | À documenter |
Une évaluation de l’état trophique du lac Saint-Charles a été réalisée dans le cadre du mémoire de maîtrise de Bourget, 2011 à partir des moyennes annuelles de 1996, 1997, 2007 et 2008 de plusieurs variables limnologiques importantes.
Selon Bourget, 2011, le lac Saint-Charles serait à un stade méso-eutrophe. Le positionnement des moyennes de phosphore total et de chlorophylle α en surface ainsi que la transparence ne concordent pas sur le diagramme de classement de l’échelle trophique des lacs du MDDELCC (MDDELCC, 2015b). Dans une telle situation, Carlson (1977) et Wetzel (2001) penchent en faveur de l’indice obtenu à partir des concentrations de chlorophylle α, cet indice biologique est intégrateur de la physico-chimie du lac (Bourget, 2011).
Les concentrations élevées de chlorophylle a observées en 2007 et 2008 (Tableau 1.2.2) en surface du lac Saint-Charles au centre du bassin nord suggèrent que les nutriments se retrouvent en quantité suffisante pour soutenir une forte biomasse de phytoplancton (Bourget, 2011).
Bourget, 2011 a également évalué les variation entre les données de 1996, 1997, 2007 et de 2008 à l’aide d’analyses de variance (ANOVA: analysis of variance) à une voie, suivies d’analyses de comparaisons multiples par paires à l’aide de la méthode de Tuckey. Dans les cas où la normalité des distributions (test de Shapiro-Wilk) ou l’homogénéité des variances (test de Levene) n’était pas respectée, une ANOVA de rangs à une voie par la méthode de Kruskal-Wallis a été utilisée. Le test de Dunn a été utilisé pour toutes les comparaisons multiples suivant une ANOVA de rangs où les groupes de traitement avaient des tailles différentes (Bourget, 2011).
Tableau 1.2.2. ANOVA à une voie des vriables limnologiques mesurées en surface au centre du bassin nord du lac Saint-Charles entre le 15 juin et le 6 novembre pour les années 1996, 1997, 2007 et 2008 (Bourget, 2011)
Le nombre d’échantillon ayant servi à calculer la moyenne et l’écart-type au tableau 1.2.2 est donné dans le tableau suivant.
Variable | 1996 | 1997 | 2007 | 2008 |
---|---|---|---|---|
PT | – | 6 (+ 21 mai) | 12 | 16 |
Nitrates | 6 | 5 | 12 | 16 |
Cond. | 6 | 5 | 12 | 16 |
NT | 6 | 5 | 12 | 16 |
pH | 7 (+10 nov) | 5 | 12 | 16 |
Secchi | 6 | 5 | 12 | 16 |
Chl α | 7 (+10 nov) | 5 | 12 | 16 |
Dans le but d’analyser l’évolution du lac, les valeurs moyennes des variables limnologiques mesurées au centre du bassin nord lors de la période d’étude (2007-2008) ont donc été comparées avec celles mesurées en 1996-1997 à la même station. Les ANOVA à une voie réalisées par Bourget entre les valeurs de 1996, 1997, 2007 et 2008 ne révèlent pas de différence significative entre les années pour le phosphore total et le nitrate. Par contre une différence significative a pu être observée pour ce qui est de l’azote total et de la chlorophylle α depuis 1996-1997 (Bourget, 2011).
Bourget apporte cependant une nuance quant à l’augmentation de la chlorophylle α, il serait tout à fait possible selon lui que cette tendance soit le fruit d’importantes variations interannuelles plutôt que par des changements à long terme (Bourget, 2011).
Il en va de même pour l’azote total. La variation pourrait s’expliquer par une divergence de méthodes de traitement des échantillons. De plus, des données mesurées par le MDDEP en 2010 à l’exutoire du lac Saint-Charles montrent de fortes fluctuation saisonnières, mais n’indiquent pas de tendance à long terme sur la période de 1998 à 2010 (Bourget, 2011).
D’autres indicateurs tels que le déficit en oxygène dans l’hypolimnion et les fleurs d’eau de cyanobactéries indiquent que le lac Saint-Charles se trouve dans un stade mésotrophe avancé (Bourget, 2011).
Un important déficit en oxygène dans les zones les plus profondes du bassin nord en période estivale a pu être observé en 2007 et 2008 ainsi que dans les études antérieures (APEL, 2009).
En effet, l’augmentation de la production de biomasse dans un lac mène à une accumulation de la matière organique près du fond. Les processus de décomposition de cette matière par la respiration microbienne consomment l’oxygène dissous dans l’eau. S’il y a une forte stratification thermique, telle qu’au centre du bassin nord, l’hypolimnion devient isolé du reste de la colonne d’eau et les concentrations d’oxygène dissous peuvent alors diminuer considérablement (APEL, 2009).
Le lac Saint-Charles possède une grande diversité de plantes aquatiques. En 2007, on y retrouvait 43 espèces de plantes aquatiques et les herbiers aquatiques couvraient près de 5% de la superficie totale du lac. Une grande diversité d’espèces est caractéristique des lacs mésotrophes (APEL, 2009).
La présence d’une plante exotique envahissante, le Myriophylle à épis, est très inquiétante au lac Saint-Charles. Il ne s’agit pas encore d’une espèce dominante dans l’écosystème, mais il pourrait le devenir assez rapidement. Au niveau du bassin sud, la plus grande concentration de Myriophylle à épis se trouve à la hauteur des Marais du Sud et s’étend jusqu’après le barrage de la décharge du lac. Les herbiers présents dans ce secteur sont denses et imposants. Le bassin sud représente un lieu de colonisation idéal pour le Myriophylle à épis, compte tenu de sa faible profondeur (maximum 4 m). Cette espèce végétale colonise habituellement les zones entre 0,5 m à 3,5 m de profondeur, mais peut aussi s’implanter jusqu’à 10 m si la transparence et les sédiments sont favorables (APEL, 2009).
Le bassin nord est moins colonisé par le Myriophylle à épis que le bassin sud. Hormis la zone des Marais du Nord, la baie Charles-Talbot et la baie Beaulieu sont des sites où les plantes aquatiques sont très nombreuses et diversifiées. Sur la rive est du bassin nord, juste après la baie Beaulieu, un grand affleurement rocheux empêche toute croissance de macrophytes. Les autres secteurs du bassin nord présentent peu de caractéristiques favorables à l’établissement d’herbiers importants avec des substrats rocheux et une zone littorale restreinte (pente raide près des rives) (APEL, 2009).
Les activités anthropiques dans le bassin versant ont un impact considérable sur les concentrations de phosphore dans le lac Saint-Charles qui auraient augmenté de 48% à 109% par rapport aux conditions naturelles. Cette appréciation provient d’un modèle explicite d’exportation de phosphore élaboré pour le lac Saint-Charles afin d’estimer l’importance relative des apports en phosphore (APEL, 2009).
Selon le modèle proposé, une charge importante en phosphore est apportée au lac en provenance des milieux ouverts et urbanisés. Il serait tout à fait pertinent de mieux quantifier les charges en provenance de ces sources pour tenter de les réduire.
Les sources ponctuelles représentent aussi un apport important de phosphore vers le lac. La charge des stations d’épuration des eaux usées des municipalités de Lac-Delage et des cantons-unis de Stoneham-et-Tewkesbury représenterait environ 10% de la charge totale, une source importante pour le lac Saint-Charles. Les apports de nutriments de ces stations devraient être mieux quantifiés, particulièrement en période de pluie. Bien que les stations soient conformes aux normes de rejet, leur charge libérée devrait être réduite. Il faut noter que la norme de rejet demandée par le MDDEFP a été abaissée à 300 μg L-1 en 2009 et que la stratégie adoptée pour réduire la concentration de phosphore à ces usines est d’ajouter plus d’alun dans l’eau usée (APEL, 2009).
Les apports provenant des installations sanitaires individuelles représenteraient quant à elles environ 7% de la charge totale. L’exportation associée à ces installations varie beaucoup en fonction du type d’installation (ex. fosse septique, puisard), de leur distance au réseau hydrographique ainsi que du type de sol et de la pente sur lequel elles sont installées. Par exemple, les sols d’origine glaciaire, de texture loameuse, épais et riches en fer comme les podzols ont une grande capacité de rétention du phosphore alors que les dépôts sablonneux d’origine fluviatile ou fluvioglaciaire ou les sols minces ne retiennent pratiquement rien. Des recherches plus approfondies permettraient d’identifier de manière précise les zones à risque dans le bassin versant. Ensuite, des installations sanitaires adaptées aux réalités du milieu pourraient être conçues pour les développements futurs. Dans un premier temps, on doit s’assurer de la conformité à la réglementation des installations sanitaires individuelles présentes sur le territoire (règlement Q-2, R.8) (APEL, 2009). Les municipalités concernées ont des programmes d’inspection en vigueur.
Quant à l’apport des milieux humides, il existe un besoin de recherches supplémentaire pour mieux caractériser l’exportation de phosphore spécifique à chaque catégorie de milieu humide (APEL, 2009). En effet, les milieux humides, selon le cas, peuvent s’avérer être des sources ou des puits de phosphore.
Aussi, comme il est mentionné dans la section 1.1 Présence de nutriments et de matières en suspension, l’état des bandes riveraines joue un rôle dans l’état du lac Saint-Charles.
Les moyennes de phosphore, d’azote et de chlorophylle α ne permettent pas de démontrer une réelle tendance à l’eutrophisation du lac Saint-Charles entre 1996-1997 et 2007-2008. Il est fort probable que d’autres facteurs soient à l’origine de l’apparition des fleurs d’eau de cyanobactéries au lac Saint-Charles. Afin d’en savoir plus sur les cyanobactéries au lac Saint-Charles, cliquez ici.
De plus, le déficit observé en oxygène dissous peut avoir certaines répercussions sur les communautés ichtyologiques. Les salmonidés sont particulièrement affectés par les conditions anoxiques de l’hypolimnion. Une telle zone anoxique au fond du lac peut affecter la croissance et le comportement, et contribuer, d’une certaine façon, au dépérissement, des espèces de salmonidés indigènes comme le Cisco des lacs (Coregonus arted), le Touladi (Salvelinus namaycuch), et l’Omble de fontaine (Salvelinus fontinalis). Une étude ichtyologique réalisée en 2005 par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune et le Conseil de bassin de la rivière Saint-Charles concluait que ces espèces avaient maintenant disparu ou étaient près de disparaître (aucun salmonidé récolté sur plus de 1800 individus) (Bourget, 2011).
L’état trophique du lac Delage semble également être transitoire, suivant le paramètre observé. Le phosphore total situe le lac Delage dans la classe oligotrophe. Par contre, les résultats de chlorophylle α et de la transparence positionnent le lac au début du stade mésotrophe et il semble que son niveau trophique soit resté le même depuis 1980, mais cette affirmation ne peut être vérifiée en raison d’un nombre insuffisant d’échantillons. En effet, un plus grand nombre d’échantillons doit être utilisé afin de retracer l’évolution temporelle de l’état trophique d’un lac. En 2007, 4 échantillons ont été prélevés entre juin et septembre. La transparence mesurée en 1980 n’est toutefois pas prise en compte, car celle-ci a probablement été altérées temporairement par un apport de sédiments de nature anthropique (APEL, 2009).
D’autres indicateurs de l’état de vieillissement du lac Delage peuvent être observés. L’apport en sédiments fins et la disponibilité en éléments nutritifs tels que le phosphore et les nitrates contribuent au développement et à la prolifération du Myriophylle à épis, l’espèce dominante parmi les 20 espèces de macrophytes identifiées au lac Delage. Cette espèce envahissante domine près de 50 % des 31 herbiers recensés et couvre à elle seule plus de 4 % de la superficie du lac. Elle forme ainsi de grands herbiers très denses et limite la diversité végétale. Les herbiers aquatiques du lac Delage sont assez importants et ils ont été colonisés par le myriophylle à épis qui pourrait prendre beaucoup plus d’ampleur. Une augmentation de la densité et de la superficie des herbiers aquatiques ainsi qu’une diminution de la diversité d’espèces qui les composent sont généralement des signes d’eutrophisation. Un suivi de l’évolution des herbiers aquatiques permettrait de suivre celle du niveau trophique avec plus de certitude (APEL, 2009).
À l’automne, ces plantes aquatiques apporteraient de la matière organique substantielle vers le fond du lac. Par la suite, la décomposition de cette biomasse végétale entraînerait une consommation d’oxygène dans l’hypolimnion. Les profils d’oxygène dissous de 2007 montrent que la concentration en oxygène diminue avec la profondeur dans l’hypolimnion. Cette couche d’eau profonde s’est appauvrie en oxygène et une zone anoxique (< 2 mg O2 /L) s’est ainsi formée au fond du lac et a pris de l’ampleur au fur et à mesure que la saison estivale avançait (APEL, 2009).
Selon l’Association pour la protection de l’environnement du lac Saint-Charles (APEL), le temps de renouvellement de 332 jours de l’eau du lac Delage le rend vulnérable par rapport aux apports externes de phosphore. Les apports externes en provenance du bassin versant peuvent y demeurer sur une longue période seraient en grande partie assimilés par les végétaux (APEL, 2009).
Selon le MDDELCC, les longs temps de renouvellement ne fragilisent pas nécessairement un lac en lien avec le phosphore qui y transite. En effet, pour une charge en phosphore égale, un lac qui aura un court temps de séjour présentera généralement une concentration en phosphore plus élevée dans la colonne d’eau. Cela est notamment dû au fait que, dans les lacs au temps de séjour plus long, le phosphore a le temps de sédimenter et d’être séquestré au fond du lac (hypolimnion), là où il est peu disponible pour les algues. En revanche, il tend à demeurer dans l’épilimnion, disponible aux algues, dans les lacs où le temps de séjour est plus court (entre le moment où il entre dans le lac et où il est évacué par l’exutoire).
D’un autre côté, il est vrai qu’un taux de renouvellement plus élevé peut contribuer à évacuer du phosphore du système plutôt qu’à l’y accumuler. Cela ne signifie toutefois pas que le phosphore accumulé posera problème (dépend de la charge, de la morphométrie du lac…). En outre, plusieurs variables vont jouer sur la disponibilité du phosphore, mais un long temps de renouvellement à lui seul ne le fragilise pas nécessairement.
De manière générale, la qualité de l’eau du lac Delage est bonne et les usages ne sont pas compromis. Toutefois, les espèces de poissons sensibles, comme l’Omble de fontaine, ont besoin à la fois d’eau fraîche (< 20 °C) et bien oxygénée (> 4 mg/L). Leur niche écologique s’est donc réduite dans le lac Delage au cours de l’été 2007 (Figure 1.2.8) (APEL, 2009).
Entre 2001 et 2007, les concentrations moyennes de surface en phosphore et en chlorophylle a ont augmenté, ce qui suggère une augmentation de la biomasse de phytoplancton et un enrichissement au phosphore. Toutefois, cette tendance ne peut être confirmée puisqu’elle n’est pas statistiquement significative. Le nombre d’échantillons n’est pas suffisamment élevé pour le phosphore et la chlorophylle α. De plus, un seul échantillon mène à conclure qu’il y aurait un enrichissement en phosphore (août 2007). Il n’est pas prudent non plus de conclure à une augmentation de la chlorophylle α puisque ce paramètre limnologique est extrêmement variable. La transparence doit être considérée avec prudence étant donné la faible profondeur du lac. La profondeur maximale du lac est de 2,5 m et sa profondeur moyenne est de 1 m. Ainsi, la mesure de la transparence situera toujours le lac dans la classe eutrophe, les classes trophiques n’étant pas adaptées pour les lacs de faible profondeur (APEL, 2009).
Entre 2001 et 2007, la superficie couverte par les herbiers aquatiques a chuté de 53 % à 6 % (APEL, 2009).
Les signes d’une eutrophisation rapide sont donc perceptibles, mais un suivi régulier du niveau d’eutrophisation permettrait de confirmer cette tendance, à conditions de prélever un nombre suffisant d’échantillons.
Étant donné la faible profondeur du lac Durand, un brassage complet et constant empêche la stratification de la colonne d’eau. De ce fait, son eau devient chaude (>20 °C) sur l’ensemble de la colonne d’eau pendant l’été et elle est bien oxygénée jusqu’au fond. Le lac Durand présente donc les caractéristiques d’un étang et ses caractéristiques le rendent très sensible aux apports externes de phosphore et de sédiments qui peuvent facilement accélérer son eutrophisation (APEL, 2009).
Le réchauffement rapide de la colonne d’eau pendant la saison estivale ne permet pas l’établissement d’espèces sensibles comme la plupart des salmonidés (APEL, 2009).
Il est possible que d’autres impacts existent, mais les observations réalisées ne permettent pas de les recenser à ce jour.
Selon les classes des niveaux trophiques établies par le MDDEFP, le lac Morin se trouvait à un stade mésotrophe à l’été 2005. La transparence peut être affectée par les matières minérales en suspension en plus de la biomasse des algues microscopiques et de la couleur. Ainsi, il faut accorder moins d’importance à ce descripteur qui place le niveau trophique au stade eutrophe. Toutefois, les concentrations moyennes de chlorophylle α et de phosphore indiquent une eau enrichie par cet élément nutritif. D’ailleurs, l’abondance des plantes aquatiques observées lors des relevés du réseau de surveillance volontaire des lacs (RSVL) indique une forte productivité dans le lac (MDDEP, 2005). Le lac Morin présente des signes clairs d’enrichissement. Une évaluation plus poussée de l’état trophique du lac Morin devrait alors tenir compte d’autres indicateurs tels que l’accumulation des sédiments, l’abondance des plantes aquatiques et du périphyton (MDDEP, 2005).
La dernière évaluation de l’état trophique du lac Morin a été effectuée en 2005 par le réseau de surveillance volontaire des lacs (RSVL). Dans une perspective d’évolution temporelle de l’état des lacs, il serait intéressant d’évaluer l’état trophique du lac Morin sur une base annuelle. Ce suivi annuel permettrait d’établir les sources de phosphore qui l’alimente, mais aussi de déterminer si l’état du lac subit des changements d’année en année.
Aucune étude approfondie n’a été réalisée au lac Morin; les informations nécessaires à l’établissement des causes de son eutrophisation et à l’identification des sources de phosphore n’ont pas été recueillies.
Les effets spécifiques de l’eutrophisation du lac Morin n’ont pas été recensés.
Variable | 2011 |
---|---|
P tot | 2 |
P dissous | 3 |
N | – |
Chl α | 1 |
Chlorures | 1 |
Couleur vrai | 2 |
Le niveau trophique des lacs Laberge n’a pas été évalué en fonction des classes des niveaux trophiques du MDDEFP. Toutefois, la Division de la qualité de l’eau du Service de l’environnement de la Ville de Québec a mesuré plusieurs paramètres aux lacs Laberge lors de l’été 2011 dont la transparence, le phosphore, la chlorophylle α et l’oxygène dissous.
La transparence de l’eau des lacs Laberge est influencée par la seule production organique, les apports en MES en provenance de tributaires étant inexistants. Les données obtenues dans toutes les sections du lac correspondent au stade mésotrophe.
Les concentrations moyennes de phosphore dissous dans les sections A et B des lacs Laberge les situent au stade mésotrophe. Par contre, l’analyse est difficile dans la section D du lac, car uniquement deux échantillons ont été prélevés.
Les résultats obtenus pour la chlorophylle α indiquent un stade oligotrophe. Toutefois, l’échantillonnage pour ce paramètre n’a été effectué qu’une seule fois.
La concentration en oxygène dissous diminue avec la profondeur. Aux sections B et D, la concentration devient presque nulle au fond du lac compromettant ainsi la protection de la vie aquatique (6 mg/L) à ces profondeurs pour des températures d’eau se situant entre 10 et 15°C (MDDELCC, 2015). Dans le cas présent, la concentration en oxygène dissous pourrait constituer un indice supplémentaire de dégradation du plan d’eau.
Les lacs Laberge ne se déversent dans aucun effluent, tout le phosphore qui y est introduit y reste. Il peut être consommé par les macrophytes ou les algues si la température le permet ou se lier aux sédiments en décomposition au fond du lac. Les lacs Laberge seraient ainsi vulnérables à une éventuelle augmentation de la concentration en phosphore qui serait d’origine anthropique et nuisible à long terme (Ville de Québec, 2011). Les sources de phosphore dans les lacs Laberge n’ont pas été identifiées.
Les effets du niveau trophique mésotrophe du lac Laberge ne sont pas connus.
Selon les classes des niveaux trophiques établies par le MDDEFP, le lac Jaune se trouvait au début du stade mésotrophe à l’été 2007. La transparence de 1,4 m caractérise l’eau très trouble du lac Jaune. Toutefois, en plus de la biomasse des algues microscopiques et de la couleur, les matières minérales en suspension peuvent aussi contribuer à diminuer la transparence, surtout compte tenu du fait que la profondeur est faible. Il faut donc accorder moins d’importance à ce paramètre. Les concentrations moyennes en phosphore total (10,7 µg/l) et en chlorophylle α (3,4 µg/l) retrouvées dans ses eaux de surface sont relativement élevées et le placent dans la zone de transition oligo-mésotrophe. En effet, l’eau est légèrement enrichie en phosphore et la biomasse d’algues microscopiques en suspension est légèrement élevée. Le processus d’eutrophisation est donc amorcé dans le lac Jaune (MDDEP, 2007).
Aucune étude réalisée n’identifie les causes de l’eutrophisation du lac Jaune. Toutefois, l’observation des images satellites en date de 2007 (Google earth, 2007) indique la présence de quelques bâtiments et chemins aux abords du lac. Les résidences localisées à cet endroit ne sont pas desservies par un réseau d’égout. Elles sont donc connectées à un système de traitement autonome des eaux usées. Ces résidences représentent ainsi un apport potentiel de phosphore pour le lac Jaune.
Les effets de l’eutrophisation du lac Jaune n’ont pas été recensés.
Une diagnose écologique du lac Saint-Augustin a été réalisée au cours des années 2000-2001. À ce moment, la moyenne des valeurs de transparence obtenues à l’aide du disque de Secchi se situe à 1 m, ce qui classe le lac Saint-Augustin au niveau eutrophe. Pour ce qui est de la chlorophylle α, la majorité des valeurs de concentration dépasse 10 µg/L, ce qui correspond au niveau eutrophe. Quant au phosphore total, la moyenne des concentrations en surface au centre du lac est de 0,06 mg/l (n=3) ce qui est très élevé et correspond également au niveau eutrophe (Bergeron et al., 2002). Les valeurs du tableau 1.2.10 représentent les valeurs pour un seul échantillon.
En 2009, un suivi de différents paramètres de qualité de l’eau a été effectué par la Ville de Québec. Les résultats de transparence de l’eau mesurés avec un disque de Secchi donnent une valeur moyenne de 1,70 mètre (n inconnu). Cette valeur est légèrement plus élevée que celle mesurée en 2001. Quant au phosphore total mesuré en surface au point le plus profond du lac, la concentration était de 140 µg/l (une seule prise d’échantillon, le 20 août par temps sec). Les concentrations de 2009 positionnent le lac au niveau hyper-eutrophe (Martineau, 2009).
En plus de ces indicateurs, l’oxygène dissous confirme l’état d’eutrophisation avancée du lac Saint-Augustin. Au cours de l’été 2001, les niveaux de saturation diminuent avec la profondeur. À l’endroit le plus profond du lac, le niveau de saturation diminue avec la profondeur au printemps. On pourrait même supposer que le fond du lac devient anoxique (absence d’oxygène) lorsque la stratification thermique est établie depuis un certain temps, principalement au cours de la stratification hivernale. Ce type de profil est typique des lacs eutrophes. En août 2009, une zone anoxique s’est formée à partir de 3,5 m de profondeur au point le plus profond du lac (Martineau, 2009).
Une dominance de cyanobactéries a été observée à la fin de l’été 2001, et des fleurs d’eau de cyanobactéries ont été observées en 2007, en 2009 et en 2012. Il s’agit d’un signe supplémentaire de l’eutrophisation du lac Saint-Augustin.
L’étude des herbiers aquatiques au lac Saint-Augustin remonte à plusieurs années. En 1976, la végétation aquatique était très abondante et occupait tout le littoral du lac, soit 35 % de la superficie totale, 23 espèces, classées en trois catégories ont été répertoriées. En 1988, Landry mentionne la présence envahissante de l’élodée du Canada et de la lentille d’eau Lemna minor. En 1992, Landry notait également l’arrivée du myriophylle qui semblait prendre la place de l’élodée du Canada (Bergeron et al., 2002).
Le phosphore serait le nutriment limitant quant à la croissance des végétaux dans le lac Saint-Augustin. De plus, la variation printanière du rapport N:P, selon la profondeur, suggère qu’il y a un apport endogène de phosphore à partir des sédiments (Tableau 1.1.10).
Les apports en phosphore dans le lac Saint-Augustin seraient donc responsables de l’état trophique et de l’apparition de fleurs d’eau de cyanobactéries. Les fleurs d’eau de cyanobactéries inhibent la photosynthèse près du fond d’un lac en limitant la pénétration de la lumière à travers la colonne d’eau, ce qui favorise l’apparition de la zone anoxique en profondeur. Ce phénomène est accentué par la présence massive des algues en décomposition. Il est normalement admit que l’anoxie peut entraîner le relargage du phosphore lié au fer dans la couche des sédiments. Un surplus en phosphore peut déclencher la croissance des cyanobactéries, cela créerait un phénomène de rétroaction positive (Bergeron et al., 2002).
Le mémoire de maîtrise de Brin (2007), intitulé Étude sur la biodisponibilité des contaminants (éléments traces métalliques et phosphore) contenus dans les sédiments du lac Saint-Augustin (Québec), souligne l’importance de considérer les sédiments au fond du lac Saint-Augustin comme un réservoir de phosphore qui contribue à la dynamique d’eutrophisation. En effet, elle a démontré le caractère biodisponible du phosphore contenu dans les sédiments. La libération du phosphore et des autres contaminants dans les sédiments est régulé par le pH et le potentiel d’oxydo-réduction. Des tests menés en laboratoire dans le cadre de cette étude avec des variations de la teneur en oxygène et du pH avec des sédiments en colonnes ont démontré qu’un milieu aérobique-basique favorise la libération d’une plus grande quantité de phosphore. Ce sont des résultats qui ne concordent pas avec les études réalisées sur le sujet qui montrent plutôt que les conditions anaérobiques favorisent la libération du phosphore car elle font varier le potentiel rédox à la hausse, ce qui favorise la libération du phosphore lié au fer. Par contre, les tests statistiques effectués par Brin ne montrent pas que la quantité d’oxygène est significative pour expliquer la relation avec la libération du phosphore. Le potentiel rédox serait un meilleur facteur pour expliquer l’augmentation de la concentration de phosphore disponible. Selon Brin (2007), en définissant mieux les conditions d’oxydo-réduction des sédiments, il serait plus facile de déterminer les conditions de relargage du phosphore.
La qualité de l’habitat du poisson est affectée par l’eutrophisation du lac Saint-Augustin. En effet, au cours de l’été, l’eau chaude et la surproduction végétale provoquent une dégradation de matière organique en profondeur au cours de l’hiver, ce qui consomme l’oxygène qui ne peut être renouvelé en raison de la stratification thermique. La faible concentration en oxygène dissous diminue la niche écologique de certaines espèces de poissons comme les salmonidés. Les espèces de poissons présents dans le lac Saint-Augustin sont typiques des lacs peu profonds, aux eaux chaudes et turbides (Bergeron et al., 2002). Outre les aspects fauniques, l’état trophique du lac Saint-Augustin, mais surtout la présence de cyanobactéries, limite les possibilités d’utilisation du lac à des fins récréatives.
Des cyanobactéries sont présentes au lac Saint-Augustin, pour en savoir plus, consultez la section 1.3 Présence de fleurs d’eau de cyanobactéries.
ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT DU LAC SAINT-CHARLES ET DES MARAIS DU NORD (APEL). 2009. Étude limnologique du haut-bassin de la rivière Saint-Charles, rapport final. Québec, 354 p.
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Mis à jour le 28 août 2015